Combien ça coûte (réellement) embaucher un conseiller aux ventes ?

Combien représente justement le coût exact pour chaque recrutement de nouveaux candidats au sein du service des ventes ? « Je n’en ai aucune idée ! » avoue d’emblée un directeur général des ventes de la région de Québec qui souhaite garder l’anonymat. 

 

En 2017, une étude de la National Automobile Dealers Association (NADA) portant sur la main-d’œuvre en concession révélait déjà une statistique peu reluisante : le taux de roulement des employés aux ventes frôle les 70 %. Quatre ans plus tard, ajoutez à ce taux considérablement élevé une pénurie de personnel, ça finit par coûter cher aux concessionnaires. Très cher !

Combien représente justement le coût exact pour chaque recrutement de nouveaux candidats au sein du service des ventes ? La plupart des concessionnaires à qui nous avons posé la question sont incapables de répondre. « Je n’en ai aucune idée ! » avoue d’emblée un directeur général des ventes de la région de Québec qui souhaite garder l’anonymat. 

 

Même chez les gros groupes 

Même réponse de la part d’un des concessionnaires qui figure pourtant dans notre dernier classement des 10 plus grands groupes de la province. « On n’a jamais fait ce calcul », concède cet intervenant qui, lui aussi, accepte de nous parler, à la condition que l’on taise le nom de son organisation. De l’avis de cette source, l’industrie automobile peut difficilement fournir une explication claire et précise à cette question parce que la très grande majorité des concessionnaires automobiles, y compris plusieurs groupes, ne disposent d’aucun service en ressources humaines (RH).

« On sait que ça coûte cher embaucher un nouveau conseiller ou conseillère aux ventes, mais y apposer un montant demeure un exercice auquel très peu d’entre nous s’astreignent actuellement. »

« Nous sommes encore une vieille industrie qui se complaît dans ses pantoufles, déclare-t-il. Ce n’est pas dans les mœurs des concessionnaires de tenir des statistiques sur ce sujet. Mais voilà, ce ‟comportement de gars qui croit tout savoir et pouvoir tout contrôler” nous explose en pleine face. On sait que ça coûte cher embaucher un nouveau conseiller ou conseillère aux ventes, mais y apposer un montant demeure un exercice auquel très peu d’entre nous s’astreignent actuellement. »

 

Une lacune omniprésente

Remarquez, l’industrie automobile n’est pas le seul secteur économique à ne pas faire ses devoirs, constate Xavier Gosseye, président de XG Solutions. Ce chasseur de têtes mentionne que plus de 95 % des dirigeants d’entreprises sous-estiment ce que coûte réellement l’embauche d’un nouvel employé. « Et non seulement ignorent-ils le réel investissement qu’ils doivent débourser pour chaque recrutement, mais chaque fois qu’ils choisissent un mauvais candidat, ils ne sont pas conscients qu’ils doivent tripler la mise initiale. Ça commence à faire de l’argent », soutient M. Gosseye.

 

Des dépenses qui grimpent vite  

Certains concessionnaires partagent tout de même avec nous un calcul sommaire. « Incluant les frais d’affichage (400 $), le temps accordé aux entrevues auprès d’une poignée de candidats (300 $), la formation (800 $ à 1000 $), les tests psychométriques (100 $) ainsi que la vérification des antécédents (100 $), la recherche d’un nouveau conseiller aux ventes peut facilement représenter près de 2000 $ », signale Yannick Bélanger, directeur des opérations chez Tremblay Auto Groupe, une entreprise qui détient sept concessions, dont une de véhicules récréatifs.

Autrement dit, le coût de base d’un recrutement pour le poste aux ventes peut rapidement monter entre 6000 $ et 9000 $ avant d’embaucher la bonne personne.

Chez HGrégoire, le service des ressources humaines estime qu’il peut aisément en coûter 3000 $ pour former un nouveau candidat. L’entreprise précise qu’il faut en moyenne trois candidats à l’essai pour éventuellement trouver le bon postulant. 

Autrement dit, le coût de base d’un recrutement pour le poste aux ventes peut rapidement monter entre 6000 $ et 9000 $ avant d’embaucher la bonne personne. « Et c’est sans compter les ventes que le concessionnaire a pu échapper lors du processus d’embauche, incluant la clientèle qu’un mauvais choix moins habile a pu lui faire perdre », martèle Xavier Gosseye.

 

…et la perte de ventes

En principe, une concession parvient à limiter le risque de perdre des clients lorsque la direction des ventes surveille adéquatement les faits et gestes de son employé en formation, tient toutefois à préciser Yannick Bélanger. Évidemment, ces heures de suivi doivent s’ajouter au coût du recrutement.   

« Il suffit, dit-il, d’établir le revenu moyen annuel que génère un conseiller. On divise ensuite ce montant par le nombre de jours ouvrables dans une année. »

Selon Xavier Gosseye, le coût réel lié à l’embauche d’un nouvel employé va donc bien au-delà de la formation et du salaire de ce dernier. « Dans l’univers des RH, une formule assez simple permet d’évaluer la valeur d’un recrutement parmi les emplois qui engendrent des revenus à une entreprise. Il suffit, dit-il, d’établir le revenu moyen annuel que génère un conseiller. On divise ensuite ce montant par le nombre de jours ouvrables dans une année. »

Prenons par exemple un revenu moyen de 100 000 $ que l’on divise par 220 jours ouvrables, on obtient un montant de 455 $. Multipliez ensuite ce montant par le nombre de jours que le poste est laissé vacant. S’il faut 30 jours pour dénicher le bon conseiller (en général, les concessions s’allouent entre un et trois mois pour former un nouveau candidat), le coût du recrutement représente déjà plus de 13 600 $ à l’entreprise. 

 

Le temps d’essai

De l’avis des concessionnaires consultés pour cet article, le temps d’essai pour évaluer un candidat qui répond ou non aux attentes peut varier de deux semaines à un mois. « Au sein de notre groupe, nous privilégions les journées d’observation. On suggère régulièrement à un nouveau candidat de passer quelques heures ou une journée dans une des concessions de notre groupe pour bien saisir l’ampleur des futures tâches », indique Yannick Bélanger tout en précisant que l’employé est rémunéré pour ces heures d’observation.

Cet exercice, dit-il, permet à l’organisation de s’ajuster et de voir si l’employé se sentira à l’aise dans son nouvel environnement. « Pour l’anecdote, nous avons un conseiller d’expérience qui travaillait dans une de nos concessions. Les résultats n’étaient malheureusement pas au rendez-vous. Au lieu de lui dire au revoir, nous lui avons suggéré d’essayer quelques jours dans une autre adresse qui fait également partie de notre groupe. Ce qui s’est avéré une excellente suggestion de notre part », explique le directeur des opérations de Tremblay Auto Groupe.

 

Aucune idée du montant, mais on a des solutions

« On savait que l’exercice nous coûtait cher, mais sans savoir le montant. Quoi qu’il en soit, on déroule désormais le tapis rouge pour le candidat qui promet. » – un concessionnaire de la région de Québec.

Bien que plusieurs concessionnaires n’aient aucune idée du coût réel d’un recrutement, certains d’entre eux avaient déjà pris des mesures pour améliorer leur sort. C’est le cas d’un concessionnaire de la région de Québec qui, depuis plus d’un an et demi, a raffiné ses stratégies de recrutement. « On savait que l’exercice nous coûtait cher, mais sans savoir le montant. Quoi qu’il en soit, on déroule désormais le tapis rouge pour le candidat qui promet. Nous sommes également très clairs et précis sur ce qu’on attend de lui ou d’elle. Tout est écrit point par point. De plus, des suivis écrits et verbaux sont faits régulièrement auprès du nouvel employé tout au long de la période de probation », explique le concessionnaire.

Et quels sont les résultats ? « Avant, nous ne parvenions à conserver que 50 % des nouveaux employés. Grâce à notre nouvelle stratégie, ce sont plus de 80 % des candidats retenus pour l’emploi qui demeurent en poste », conclut fièrement notre source de la région de Québec.

 

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