Ainsi pense Antoine: Bienvenue en 2023

C’était en 2000. Alors que je n’étais qu’aux balbutiements de mon métier, j’avais été engagé par un concessionnaire automobile dans l’optique de m’occuper des ventes en ligne. Une stratégie qui, à l’époque, n’était pas prise au sérieux, bien qu’elle ait permis de faire entrer plusieurs clients potentiels en concession. Mon rôle consistait à répondre aux questions des internautes et à des demandes de prix, ainsi qu’à donner des rendez-vous. Il arrivait de temps à autre que des clients soient prêts à effectuer une transaction sur-le-champ. Ils tentaient alors un contact par Internet pour éliminer des étapes et gagner du temps. Ils se montraient clairement plus « allumés » que l’industrie en voulant effectuer une transaction en ligne. Par Antoine Joubert. 

 

Cependant, je devais inviter ces clients à se présenter en concession pour, en somme, recommencer un processus inutile, puisqu’ils étaient déjà prêts à signer les papiers. Pour la petite histoire, j’étais au service d’une concession Toyota, qui à cette époque essayait maladroitement d’instaurer une politique de prix fixe baptisée Accès Toyota. En raison de cette politique, il n’y avait aucune place à la négociation, donc le client était en mesure d’accepter ou non la proposition financière faite en ligne avant de se déplacer.

Au final, après environ six mois de travail, un seul consommateur avait réalisé la quasi-totalité du processus d’achat en ligne. Il n’a eu qu’à se présenter en concession avec un chèque certifié, à signer les documents et à repartir avec sa nouvelle Camry. Les vendeurs ne voyaient en ce processus qu’une façon d’hameçonner le client, qui devait obligatoirement se taper leur discours et leurs propositions de produits et d’accessoires, alors qu’il savait déjà ce qu’il souhaitait.

Plus de vingt ans plus tard, nous sommes encore à la même place. Vous me direz que les clients magasinent plus que jamais en ligne et se présentent souvent en sachant ce qu’ils veulent, mais rares sont les cas où l’essentiel du travail est fait en ligne ou même par téléphone. L’achat d’un véhicule implique encore et toujours un discours de vendeur, le passage chez le directeur financier ainsi que la prise de livraison, souvent effectuée par une troisième personne. Bien sûr, il existe plusieurs situations où la demande de financement est plus complexe, ce qui exige de l’expertise. Par contre, dans un contexte normal, plusieurs consommateurs peuvent et souhaitent conclure une transaction en ligne. De A à Z. Cela inclut la demande de prix, la négociation, l’évaluation du véhicule d’échange, l’accès au crédit, la signature du ou des contrats et la prise de rendez-vous pour une livraison dans un lieu au choix du consommateur.

Comment se fait-il qu’on n’y soit pas déjà, alors que nombre de clients ne rêvent que de ça ? Bien sûr, la Loi sur la protection du consommateur oblige le commerçant, dans un contrat de vente itinérante, à faire signer la documentation à la main, à l’adresse même du commerce. Une loi totalement désuète et aujourd’hui souvent contournée par plusieurs, puisqu’il qu’une livraison à domicile est souvent à l’avantage du vendeur comme de l’acheteur.

Hélas, on ressent encore une grande réticence de plusieurs commerçants automobiles envers les transactions en ligne ou la livraison des véhicules ailleurs qu’au commerce. Pourquoi ? (voir l’explication de certains concessionnaires lors de la Rencontre au Sommet organisée par la CCAQ et iA Services aux concessionnaires). Parce que l’industrie automobile est un paquebot dont le gouvernail est raide, ce qui explique ce temps fou pour changer de cap. Sans vouloir généraliser, plusieurs vendeurs sont bien dans leurs habitudes et ne souhaitent pas les changer. Or, il est venu ce temps où les choses doivent être faites différemment. Ne serait-ce que pour s’adapter à la réalité d’aujourd’hui et même aux besoins des acheteurs. 

Comme plusieurs clients, j’aime les choses qui se font vite et bien. J’ai un horaire chargé qui me fait apprécier les entreprises qui ne me font pas attendre parce que le directeur financier termine une rencontre, parce que la pellicule protectrice est en train d’être installée ou parce qu’il y a eu des problèmes avec l’immatriculation (très commun en ce moment !). Une livraison à domicile ou au travail, effectuée en 15 minutes, c’est pour moi comme pour plusieurs une formule gagnante. Et bien que certains commerçants aient choisi de contourner la loi et d’emboîter le pas à l’évolution, je crois qu’il est plus que temps que toute l’industrie se mobilise pour aller de l’avant avec ces possibilités. En somme, si Vidéotron me permet de louer des films à même mon téléviseur connecté et non plus en m’obligeant à me déplacer en boutique pour choisir mon DVD, je pense qu’un vendeur automobile devrait pouvoir lui aussi réaliser des transactions de façon plus productive.

 



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