Ainsi pense Antoine: Tous ses œufs dans le même panier ?

Lors d’une discussion que j’ai eue avec Frank Weber (l’homme à la tête de la gestion des produits de BMW AG), j’ai rapidement pu comprendre que les objectifs de nos gouvernements envers les électriques étaient aussi farfelus qu’ambitieux. Ses propos étaient certes bien différents de ceux qu’on entend des personnes qui militent en faveur de l’adoption de masse, par le public, des véhicules électriques, mais ils m’ont semblé assurément plus crédibles. Par: Antoine Joubert

 

Weber mentionne d’abord qu’il est impossible pour un constructeur, qui conçoit des véhicules cinq ou six ans d’avance, de réagir à un changement de loi radical, souvent causé par des changements de gouvernements (d’ailleurs, Frank Weber travaille actuellement sur le développement de modèles qui verront le jour en 2030). Dans le seul marché des États-Unis, il existe une multitude de réalités bien distinctes, de lois qui diffèrent et qui sont modifiées constamment. Vendre un véhicule en Californie et en vendre un dans le Wyoming, ce n’est pas le même combat, dit-il. Qui plus est, on atteindra éventuellement un point où fabriquer des batteries sera mathématiquement plus néfaste pour la planète que poursuivre la construction et la vente de véhicules à essence, qui continueront de s’améliorer au chapitre des émanations polluantes.

 

À tout cela s’ajoute la réalité financière de devoir vendre les véhicules électriques plus cher, puisque leur coût de construction est nettement plus élevé que celui des modèles à essence. La rentabilité devient, de ce fait, un enjeu qui pèse non seulement sur le prix des VÉ mais aussi sur celui de l’ensemble des véhicules. L’uniformité dans ce domaine est impossible, voilà pourquoi BMW ainsi que plusieurs autres constructeurs poursuivront le développement et la commercialisation de diverses technologies mécaniques, et les efforts se concentreront autant sur les véhicules à essence traditionnels que sur les hybrides, les hybrides enfichables, les motorisations diesel, les électriques et même les modèles à hydrogène. Encore une fois, parce que la réalité des marchés diffère, à certains endroits sur cette planète, l’hydrogène est une solution plus viable que l’électrique.

 

Ne soyez donc pas étonné si vous sentez de la part des constructeurs une certaine réticence à se lancer à fond dans l’électrique. Chevrolet effectue un énorme tapage médiatique avec son Equinox EV (qui tarde à arriver), mais vous pouvez être certain que le modèle à essence continue de faire partie des plans à long terme. Sans parler de la récente annonce de Ford, qui octroie de nouveaux rabais pouvant aller jusqu’à 13 000 $ sur les Mustang Mach-E 2023, permettant ainsi d’obtenir de nouveaux crédits gouvernementaux. L’heure est à l’ajustement des marchés, concessionnaires et consommateurs sont à même de le réaliser. 

 

On imagine facilement que les marchés et la valeur des VÉ vont se stabiliser le jour où les subventions gouvernementales vont cesser. À ce moment, il sera possible d’en dresser le portrait réel. Pour l’heure, il en va autrement. Il n’y a qu’à voir les taux à 0 % sur des Nissan Ariya et les baisses de prix (plusieurs dizaines de milliers de dollars) sur des électriques de luxe comme les Lucid Air et les Mercedes-Benz EQS.

 

Cela dit, même si on assiste actuellement à un ajustement, voire à une remise en question, des constructeurs face à l’électrique, cette technologie demeure un incontournable. Tous les manufacturiers doivent s’y conformer et offrir des produits efficaces et compétitifs. Ceux qui ont choisi jusqu’ici la voie facile en proposant des produits moins attrayants ou de second rang réaliseront rapidement qu’ils perdent du terrain. Quoi qu’on dise, ce marché en est un d’importance aujourd’hui : déjà plus de 20 % des véhicules vendus au Québec reçoivent une plaque verte.

 

À la lumière des commentaires de Frank Weber, et en constatant que plusieurs constructeurs refusent de mettre tous leurs œufs dans le même panier, on peut aisément comprendre pourquoi Stellantis débarque avec un nouveau moteur à six cylindres turbocompressé produit à grands frais. Même chose pour Mazda, qui multipliera l’offre de sa nouvelle mécanique à travers une multitude de modèles. 

 

Les opinions diffèrent énormément sur le sujet, et force est d’admettre que la réponse se trouve dans le libre choix. Un choix qui sera certes un peu plus contrôlé et réglementé, mais qui demeurera dicté par les désirs de la population et par les constructeurs qui travailleront de pair avec les gouvernements.



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