Ainsi pense Antoine: Servir notre clientèle… ou notre poche?

Depuis nombre d’années, plusieurs concessionnaires ou groupes de concessionnaires ont développé des entreprises parallèles à leur concession, soit des entreprises de location maison ou d’exportation vers les États-Unis. Tout ça dans l’optique d’une meilleure rentabilité pour chaque unité vendue, mais aussi parce que cette pratique permet de renouveler très rapidement un client qui, sans le réaliser, devient en quelque sorte hameçonné. Par: Antoine Joubert 

 

Par exemple, un camion Chevrolet, Ford ou Ram vendu à faible profit, puis racheté six mois plus tard en vue d’une exportation américaine, voilà une pratique désormais courante. Certains commerçants préféreront louer des véhicules immatriculés et assurés, le temps que ceux-ci puissent être considérés comme des véhicules d’occasion, avant d’en reprendre possession pour ensuite les exporter.

 

Cette pratique, elle existe aussi pour certains modèles de VUS ou des voitures d’exception. La Corvette est sans doute le plus bel exemple. Voilà d’ailleurs pourquoi des modèles se font si rares chez nous, alors qu’ils se multiplient sur le marché américain, avec une valeur qui commence à plafonner.

 

Naturellement, le problème demeure celui d’une concurrence qui pourrait être qualifiée de déloyale face à un concessionnaire qui n’a pour objectif que de servir sa clientèle, un concessionnaire qui ne peut vendre au prix coûtant ou sous le prix coûtant parce qu’à l’inverse des autres, il ne recevra pas de généreuses compensations de la part du constructeur, qui applaudit bien sûr cette force du nombre. Conséquemment, il sera impossible pour un concessionnaire Ford d’offrir un camion F-150 à prix plancher, considérant qu’il s’agit du seul profit qu’il obtiendra dans la transaction de ce véhicule. Voilà pourquoi l’exportation, également avantageuse en raison de la faiblesse de notre dollar, vient encourager les concessionnaires à se tourner vers cette pratique, qui devient ardue pour ceux qui souhaitent débuter, puisque d’autres y sont bien ancrés depuis déjà très longtemps. 

 

En observant la situation, on constate donc que l’entreprise qui ne se concentre que sur des ventes au Québec est en quelque sorte handicapée face à ceux qui exportent. Certes, plusieurs s’en sortent très bien, particulièrement lorsqu’il est question de gros groupes de concessionnaires. Cela dit, le consommateur en quête du meilleur prix (surtout par les temps qui courent) ne peut comprendre pourquoi un concessionnaire est en mesure d’offrir le même produit 2000 $ de moins, après s’être fait dire par l’autre qu’il ne peut pas descendre à ce niveau sans perdre d’argent.

 

Pourquoi nos véhicules d’occasion coûtent-ils si cher ? Pourquoi un consommateur se fait-il talonner par un concessionnaire souhaitant racheter son véhicule après six mois, un an, voire deux ans ? Parce qu’ils se font rares. Parce qu’on les achemine trop souvent vers les États-Unis, ce qui crée un déséquilibre de notre marché. 

 

Évidemment, loin de moi l’idée que le gouvernement mette en place une règle sur l’exportation. D’une part, parce qu’il a d’autres chats à fouetter (pour être poli…); d’autre part, parce que la multiplication des ventes, doublée de coûts d’achat plus élevés et de taxes elles aussi à la hausse, remplit les coffres. Il suffirait d’interdire l’exportation de nos véhicules vers le marché américain pour rapidement constater la dégringolade de certaines entreprises et l’effet balancier d’un retour vers un marché automobile plus normal. Je ne vous dis pas que le prix des véhicules neufs serait en baisse, mais il est clair que celui des modèles d’occasion serait soudainement rééquilibré, bien sûr à l’avantage du consommateur. 

 

Or, puisque tout le monde y gagne (à l’exception des consommateurs), les choses ne sont pas près de changer. D’autant plus que notre dollar ne semble pas regagner en valeur face au dollar US. J’oserais même avancer que cette situation plaît à certains consommateurs heureux de pouvoir changer de véhicule aux six mois. Est-elle financièrement avantageuse pour eux ? Pas toujours, mais ils la trouvent pratique et agréable, surtout que dans certains cas, aucun entretien n’est à faire. 

 

En terminant, on peut s’imaginer que l’augmentation des véhicules électriques sur notre marché aura un petit impact négatif sur l’exportation, puisque ces véhicules sont nettement moins populaires ici qu’aux États-Unis, où les ventes demeurent en proportion plus que symboliques face au marché du Québec.

-fin-

 

 

 



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