Robert Poëti P.-D.G de la CCAQ

Tête-à-tête: Les sept vies de Robert Poëti, P.-D.G de la CCAQ

Oui, c’est vrai, on parle généralement de « neuf vies ». Mais durant notre entrevue avec le nouveau président-directeur général de la Corporation des concessionnaires automobiles du Québec, nous avons appris que, sans verser dans la numérologie, Robert Poëti trouve que le chiffre sept lui colle particulièrement à la peau. En voici la preuve… en sept points !

Propos recueillis par Michel Crépault

 

 

1. LE POLICIER

Robert sort d’un collège privé (son père tenait à lui offrir l’éducation qu’il n’a pas eu) et veut devenir policier. Pourquoi ?

Avec un ami en route vers Québec dans un bazou, nous apercevons cette dame en panne le long de la 20. Elle a une crevaison. Ça nous a pris 10 minutes pour réparer. Elle a voulu  nous donner 20$, une fortune. On a refusé. Plus tard, j’ai dit à mon ami : « C’est drôle le sentiment de bien-être que j’ai d’avoir aidé cette femme-là. Mon père nous a toujours dit d’essayer de faire au moins B.A. par jour. Ça serait le fun si je pouvais gagner ma vie à aider les citoyens… »

 

2. L’HUMOUR

Dans la police, il n’y a pas de petites phrases « cute », pas quand on parle de meurtres. C’est pourquoi les gens pensaient que j’étais hyper carré, un peu plate alors que dans la vraie vie, je ne suis pas de même. Mon exutoire, c’est l’humour. D’ailleurs, dans mon travail, peu importe lequel, je dois y trouver du plaisir. Mais en politique, j’ai compris que l’humour, même correct, ça ne passe pas. Les gens l’associent à un manque de crédibilité.

 

 

3. LE COMMUNICATEUR

J’ai découvert mon « talent de communicateur » à Papineauville, quand j’étais patrouilleur. J’étais intervenu dans un vol à main armée à St-André-Avellin. Les caissières avaient été séquestrées dans la chambre forte. Le lendemain, dans le journal, c’était écrit que les caissières avaient ouvert la porte aux criminels. J’ai appelé à Hull le porte-parole de la Sûreté du Québec pour lui demander s’il pouvait rectifier le récit qui était inexact. Le policier avait une piètre opinion des journalistes et « mon intervention ne changerait rien » a-t-il dit. « Je croyais que c’était votre job de rétablir les faits », ais-je répondu. « Si tu n’es pas content, t’as juste à postuler pour mon job, je prends ma retraite. 

Je suis allé voir mon sergent et j’ai postulé en lui disant que « n’importe qui va être meilleur que lui ». J’étais en colère ! Il m’a dit d’oublier ça, que ça se décidait à Montréal. Je suis descendu dans la métropole en uniforme pour rencontrer le directeur des communications à qui j’ai lancé : « On me dit que c’est tout organisé d’avance… » Il m’a répondu : « Postulez, mon brave. » J’ai eu le poste.

J’ai reçu un coup de fil de Paul Arcand et il m’a demandé si je pourrais de temps en temps remplacer Patrick Lagacé et Pierre Curzi. Avant de dire oui, j’en ai parlé au conseil d’administration de la CCAQ. J’évite les sujets politiques, je veux rester neutre. J’ai donc remplacé durant deux jours. Ils ont aimé ça. Ça se poursuit du studio de Québec. C’est win-win pour tout le monde : ça dépanne le 98,5 et ça nous garde, la CCAQ et moi, dans les médias.

On pourra donc annoncer dans AutoMédia : « Si vous hésitez entre une Honda et une Toyota, appelez Bob! »

(rires) Ma ligne est très claire : tous les modèles sont bons mais le meilleur pour vous est celui qui vous convient.

 

 

4. L’INDUSTRIE AUTOMOBILE

L’âge d’or des concessionnaires est-elle derrière nous ?

En 1982, quand je louais un film, c’était 8$ et je roulais 20 km pour le ramasser à Hawkesbury et le ramener le lendemain. Aujourd’hui, je loue en ligne. Même chose pour l’industrie automobile. La voici connectée et branchée. Elle évolue mais ne meurt pas. Elle va s’adapter aux changements, j’en suis convaincu.

 

Magasiner sa voiture en ligne, vous aimez cette tendance ?

Une sommité dans le milieu de l’automobile, que je ne nommerai pas mais qui a plus d’une concessions, qui arrive au terme de sa carrière et dont les enfants assurent la relève, m’a raconté : « Aujourd’hui, le client magasine son véhicule en ligne, se fait sortir 5-6 prix, arrive dans ma concession, me lance sa recherche imprimée sur le bureau et me dit « Je veux mieux que ça ! » Moi, je me lèverais et je lui montrerais la porte ! Ça me choque cette façon d’agir ! Mais pas ma fille ni mon gars. En deux secondes, ils sont devant l’ordi avec le client. Ils sont bien meilleurs que moi ! »

Moi je nuancerais en disant qu’ils ne sont pas meilleurs, ils se sont adaptés à la clientèle d’aujourd’hui.

 

On devrait peut-être avoir des concessions pour des têtes blanches et d’autres pour des milléniaux…

Je pense effectivement qu’il existe des types de conseiller en vente qui répondent mieux à nos attentes respectives. Moi, j’ai changé ma voiture avant de venir à la CCAQ. Je l’ai complètement construite en ligne (une hybride enfichable). Ça m’a pris 4-5 heures. Ce que j’ai demandé au concessionnaire, c’est de me dire pourquoi je devrais l’acheter chez lui plutôt qu’ailleurs. Après avoir pris livraison de mon auto, le jeune vendeur a voulu me refiler au gars du service. Je lui ai dit : « Oh non ! S’il y a quoi que ce soit, c’est toi que je vais appeler parce que c’est toi qui me l’a vendue! » C’est pour ça que je dis que la complémentarité de l’Internet change les méthodes de vente, à l’avantage des concessionnaires qui vont s’éloigner de la vieille image. »

 

 

5. LES DÉFIS À LA CCAQ

En prélude, j’aimerais rendre hommage à Jacques (Béchard), à ce qu’il a construit. Je vais continuer son travail. Dans un premier temps, j’ai étudié la Corporation, même avant d’accepter le poste. Ensuite j’ai identifié les défis d’aujourd’hui et de demain. Je veux gérer la CCAQ comme une entreprise privée. Nous sommes là pour eux (les membres) et par eux. Nous sommes à leur service. Ce qui va bien, maintenons-le. Et regardons là où nous pouvons innover. Je pense entre autres à :

  • Le volet environnement : nous devons réussir un amalgame où le consommateur est bien servi tout en respectant l’environnement;
  • Travailler avec des partenaires qui permettront à l’industrie de progresser : CAA, Équiterre, le gouvernement, l’Office de la protection du consommateur, etc. Nous devons être en amont des changements législatifs;
  • Le manque de main-d’œuvre dans les ateliers de service et de carrosserie : on travaille directement avec l’Immigration. Ce que j’ai compris du gouvernement de M. Legault, c’est qu’il veut 10 000 immigrants de moins que les 50 000 prévus annuellement par les Libéraux mais 40 000 qui auront un emploi, qui s’intègreront rapidement et qui parleront français. Alors, nous avons ciblé la France et la Tunisie. Nos employeurs sont prêts et je ne parle pas du centre-ville de Montréal mais bien du Lac-St-Jean,  de Trois-Rivières, de Rouyn-Noranda. L’intégration régionale, c’est la clef pour la main-d’œuvre.

 

J’ai diné avec Michel Larin, président et chef de la direction d’Industrielle Alliance Assurances et Services Financiers. Il m’a demandé : « Qu’est-ce que vous attendez de nous ? » J’ai répondu : « Quelque chose que je ne sais pas encore, que vous allez me faire découvrir. »

 

Robert Poëti et sa fille Maude
Robert Poëti et sa fille Maude (36 ans)

6. SA FAMILLE

Avant d’accepter l’offre de la CCAQ, vous en aviez déjà reçu deux autres (ndlr : dont une de la firme de sécurité Garda). Auprès de qui avez-vous demandé conseil ?

« Là, on touche le bout plus difficile… Quand vous êtes en politique et que vous avez une fonction ministérielle, étonnamment, vous êtes assez seul. D’autant que ma conjointe de l’époque était procureur chef-adjoint au Palais de justice de Montréal, donc ne pouvait aucunement participer à des évènements politiques. Elle m’a néanmoins poussé à dire « oui » à Jean Charest. Ça faisait 14 ans qu’on était ensemble (oui, 2 x 7 ans…) et mes absences ont fait qu’elle a eu une vie parallèle, professionnelle et personnelle. Je n’étais pas là ! En décembre 2017, elle est partie. Divorce.

Alors quand vous me demandez à qui j’ai demandé conseil face aux trois offres, je réponds « pas à grand monde »… Je peux quand même compter sur ma fille Maude (36 ans), que j’adore et qui a toujours été là pour moi, sur Colette Provencher (Miss Météo à TVA), une amie depuis 35 ans, et un collègue de travail qui remonte à mes tous débuts à la Sûreté. Et n’oublions pas Gisèle, ma tante de 88 ans, avec une tête (dure) comme la mienne, la doyenne des Poëti avec qui je parle presque quotidiennement, mes parents étant décédés. Chez les Italiens, la famille, c’est important. Mais j’ai assumé seul ma décision de dire oui à la CCAQ.

 

7. SA BIO EN… 7 POINTS !

#1 – 13 août 1955 : naissance à Montréal

#2 – Diplôme de l’École nationale de police du Québec et maîtrise en administration publique (obtenue à l’ENAP en 2000)

# 3 – 1976 à 2004 : Sûreté du Québec, soit 28 ans de service (4 x 7 ans…)

# 4 – 2004 à 2011 : directeur du développement des affaires chez Dicom Express et GoJIT (7 ans…)

# 5 – 2011 à 2012 : président de Robert Poëti Communications Inc.

# 6 – 2012 à 2018: élu député libéral de la circonscription de Marguerite-Bourgeoys, différents postes au gouvernement, dont Ministre des Transports du Québec (en comptant la période de flirt avec l’équipe de Jean Charest, 7 ans en politique…)

# 7 – Depuis le 19 octobre 2018, p.-d. g. de la CCAQ. (Un contrat de 7 ans, M. Poëti ? Non, cinq, mais on verra…)

 

 

 

 

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